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unine - Faculté de droit de l'Université de Neuchâtel

NLRCAS Octobre 2021

Editée par Christoph Müller, Anne-Sylvie Dupont, Guy Longchamp et Alexandre Guyaz

TF 4A_344 et 342/2020 du 29 juin 2021

Responsabilité aquilienne; responsabilité de l’administrateur, causalité, art. 754 CO

D’après l’art. 754 al. 1 CO, les membres du conseil d’administration répondent à l’égard de la société, de même qu’envers chaque actionnaire ou créancier social, du dommage qu’ils leur causent en manquant intentionnellement ou par négligence à leurs devoirs. La responsabilité de l’administrateur est subordonnée à la réunion des quatre conditions générales suivante : la violation d’un devoir, une faute (intentionnelle ou par négligence), un dommage et l’existence d’un rapport de causalité (naturelle et adéquate) entre la violation fautive du devoir et la survenance du dommage.

Seules des circonstances exceptionnelles pourraient conduire à la conclusion que l’administrateur qui a failli à ses devoirs est exempt de faute. Pour qu’il en soit ainsi, il faut que la personne recherchée ait été, au moment des faits, en état d’incapacité de discernement, dans une situation de contrainte absolue ou dans celle d’erreur inévitable sur les faits provoquée notamment par la tromperie d’un tiers. Dans ces cas, l’absence de faute ne découle pas de la comparaison avec le comportement d’un administrateur raisonnable, mais d’un comportement subjectivement excusable de l’administrateur. Le fait que l’administrateur responsable doit suivre les instructions d’un tiers ou d’un organe auquel il est subordonné n’exclut pas sa faute. Il s’ensuit que l’administrateur fiduciaire engage en principe sa pleine responsabilité. Dès lors qu’une négligence légère suffit, le degré de la faute n’est pas déterminant pour décider si la responsabilité de l’administrateur est engagée, mais il peut jouer un rôle dans la réduction de l’indemnité lorsque le responsable n’encourt qu’une faute légère (art. 43 al. 1 CO).

En l’espèce, les deux administrateurs ont objectivement violé leurs devoirs en exécutant le paiement litigieux, puisqu’au vu des spécificités de leurs fonctions et du rôle qu’ils jouaient dans l’organisation de la société suisse et du groupe, ils auraient pu déceler la supercherie dont ils ont été victimes. Elle ajoute que, même en l’absence d’une escroquerie, les administrateurs auraient violé gravement leurs devoirs en exécutant un paiement pour éviter un contrôle fiscal inopiné, ce d’autant qu’il était dissimulé par une facture inexistante portant sur des biens et des services inexistants, ce qu’ils savaient. Il s’ensuit que le recours du recourant n° 1 doit être rejeté.

Le recourant n° 2 soulève trois griefs. Premièrement, il invoque la violation de son droit d’être entendu, en ce qui concerne sa prétendue connaissance du motif fiscal du virement litigieux et son absence de contestation de l’existence d’un dommage. Deuxièmement, il se plaint d’appréciation arbitraire des faits et des preuves. Troisièmement, il soulève la violation de l’art. 8 CC et des art. 754, 759, 717 et 719 al. 1 CO, contestant le dommage, la violation fautive de ses devoirs, ainsi que la causalité dès lors que l’ordre de transfert a été modifié après qu’il l’a validé.

Sans qu’il ne soit nécessaire d’examiner si le recourant n° 2 a eu un comportement gravement fautif en donnant l’ordre de transfert initial, force est de constater que l’ordre qu’il a donné n’a pas eu de suite, puisqu’il n’a pas pu être exécuté. Puisqu’il n’a pas participé aux deux modifications du SWIFT qui ont, seules, entraîné l’exécution du transfert litigieux, le dommage n’est pas en relation de causalité naturelle avec son éventuel comportement fautif. Il s’ensuit que le recours du recourant n° 2 doit être admis et l’arrêt attaqué réformé.

Auteur : Bruno Cesselli, expert à Bulle

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Responsabilité aquilienne Causalité

TF 9C_710/2020 du 10 août 2021

Assurance-maladie; assurance obligatoire des soins, Liste des spécialités; art. 65b OAMal; 34f OPAS

Dans le cadre de l’évaluation du caractère économique d’un médicament, la comparaison avec d’autres médicaments selon l’art. 65b al. 2 let. b OAMal doit se faire sur la base des préparations originales figurant sur la liste des spécialités au moment du réexamen et qui sont utilisées pour traiter la même maladie (art. 34f al. 1 OPAS). Le TF confirme que l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) jouit d’une grande marge d’appréciation dans le choix des médicaments qui feront l’objet de la comparaison (cf. ATF 147 V 194), par exemple en se limitant à la même « gamme » de médicaments.

Auteur : Guy Longchamp

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Assurance-maladie

TF 6B_735/2020 du 18 août 2021

Responsabilité du détenteur de véhicule automobile; faute, lésions corporelles par négligence, principe de la confiance; art. 125 CP; 26 LCR

En matière de circulation routière, le degré de diligence devant être adopté pour éviter de porter atteinte à autrui se détermine selon les règles de la loi sur la circulation routière et de ses ordonnances (c. 3.2.2). Le principe de la confiance qui découle de l’art. 26 LCR permet à un usager de la route se comportant régulièrement d’attendre des autres usagers, aussi longtemps que des circonstances particulières ne doivent pas l’en dissuader, qu’ils se comportent également de manière conforme aux règles de la circulation, c’est-à-dire ne le gênent pas ni ne le mettent en danger (c. 3.2.3). Cela vaut notamment pour l’usager d’un giratoire, à l’égard de ceux qui ne s’y sont pas encore engagés (c. 3.4.2).

Même en présence d’un trafic élevé, l’usager d’un giratoire n’est pas censé s’attendre à ce qu’un autre usager s’engage dans celui-ci d’une manière propre à lui couper la priorité. Dans ces circonstances, les lésions subies par l’usager prioritaire, dans le cadre d’une chute résultant de son freinage d’urgence, sont en lien de causalité naturelle avec l’engagement de l’autre usager dans le giratoire, même si celui-ci a en définitive stoppé son trajet si bien qu’une collision ne se serait pas produite même en l’absence du freinage d’urgence. Ne pouvant pas être certain que l’autre usager freinerait après s’être engagé sur un mètre dans le giratoire, l’usager prioritaire était à la fois en droit et obligé de prendre les précautions propres à éviter une éventuelle collision (c. 3.3.1-3).

L’usager du giratoire qui roule derrière un véhicule volumineux le cachant des usagers susceptibles de s’engager sur cet ouvrage n’est pas tenu de prendre des précautions particulières. Il appartient au contraire à celui qui entend pénétrer dans le giratoire d’attendre d’avoir une visibilité correcte après le passage dudit véhicule volumineux (c. 3.4.2).

La façon avec laquelle l’usager non prioritaire s’est engagé dans le giratoire, qui a surpris l’usager prioritaire et a amené celui-ci à modifier brusquement la conduite de son véhicule, comporte le risque d'une manipulation erronée et d’une perte de contrôle, selon le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie. Ce lien de causalité adéquate n’est pas interrompu par une faute concomitante de l’usager prioritaire, en relation avec l’art. 31 al. 1 LCR qui impose en principe de rester constamment maître de son véhicule (c. 3.6).

Auteur : Alexandre Bernel, avocat, Lausanne et Aigle

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Responsabilité du détenteur de véhicule automobile Faute

TF 8C_115/2021 du 10 août 2021

Assurance-invalidité; salaire d’invalide, abattement, salaire statistique; art. 16 LPGA

L’objet du recours est de savoir s’il est justifié, dans le cas d’espèces, de retenir un abattement de 10 %, sur le salaire d’invalide fixé sur la base des tables statistiques ESS (c. 3.1). Le TF rappelle les règles fondamentales relatives à la jurisprudence rendue à l’aune de l’ATF 126 V 75 (c. 3.2). Il examine ensuite si les éléments invoqués par le recourant, à savoir l’âge, les limitations fonctionnelles, le travail à temps partiel, l’absence de formation professionnelle, les connaissances rudimentaires de langue allemande ou le fait d’être titulaire d’un permis C peuvent justifier une telle réduction additionnelle (c. 4).

Le TF considère que c’est à juste titre que le recourant n’a pas contesté le fait que le critère de l’âge, à lui seul, n’impliquait pas une réduction de salaire. Le TF relève que de toute façon c’est une appréciation globale qui doit être réalisée (c. 4.2). Sur la base des rapports d’expertise au dossier, le TF considère ensuite que les limitations fonctionnelles psychiatriques, néphrologiques et rhumatologiques du recourant ne se recoupent qu’en partie. Le levage, le port et le transport réguliers de charges moyennes et lourdes ne sont ainsi plus exigibles. Des activités physiquement légères à modérées par intermittence peuvent cependant toujours être effectuées mais uniquement pendant cinq à six heures par jour, soit à l’heure, soit avec un besoin accru de pauses. Ces limitations entraînent ainsi une sélection dans les activités adaptées exigibles et représentent nécessairement un désavantage sur le marché du travail. Il convient d’en tenir compte dans le cadre de l’appréciation globale des facteurs justifiant un abattement additionnel sur le salaire statistique (c. 4.2.1). Il en va de même du critère du temps partiel (c. 4.2.2.) ainsi que de l’absence de formation professionnelle et des connaissances de langues insuffisantes (c. 4.2.3).

Le TF relève en sus qu’il est effectivement statistiquement démontré, au moyen du tableau TA12 ESS 2016, que les salaires des hommes sans fonction d’encadrement sont inférieurs d’environ 3 % à la moyenne globale s’il s'agit d’étrangers titulaires d’un titre de séjour permanent (catégorie C) (c. 4.2.4). Au terme de son analyse, le TF reconnaît donc le droit à un abattement de 10 % sur le salaire statistique lequel doit en outre, contrairement à ce que la Cour cantonale avait jugé, être déterminé sur les tabelles ESS 2016, et non 2014 (c. 4.3). Le recours est admis et le recourant mis au bénéfice d’une demi-rente d’invalidité, en lieu et place d’un quart de rente (c. 4.4 et 4.5).

Auteure : Rébecca Grand, avocate à Lausanne

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Assurance-invalidité

Brève...

La conclusion tendant à la non-publication du jugement rendu par le TF doit être rejetée dans la mesure où la personnalité de la recourante doit être considéré comme suffisamment préservé par les mesures usuelles d’anonymisation. Bien que l’on ne puisse pas exclure que des personnes proches de l’affaire identifie l’assurée concernée, cela ne justifie pas que l’on déroge aux règles habituelles dès lors qu’il en va en réalité ainsi dans pratiquement toutes les affaires publiées par le TF (TF 8C_371/2021 c. 6).

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