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unine - Faculté de droit de l'Université de Neuchâtel

NLRCAS Septembre 2022

Editée par Christoph Müller, Anne-Sylvie Dupont, Guy Longchamp et Alexandre Guyaz

Cette nouvelle newsletter, qui s’intéresse aux nouveautés en matière de contrats immobiliers (vente immobilière et transactions analogues, entreprise, architecte et ingénieur), et en matière d’hypothèque légale, paraîtra mensuellement.

Elle a été créée sous l’égide de la Faculté de droit de l’Université de Neuchâtel, de son hubimmobilier (hub-immobilier.ch) et en collaboration avec la Chambre des avocats spécialistes FSA du droit de la construction et de l’immobilier. Elle est placée sous la responsabilité du professeur François Bohnet, ainsi que de Marcel Eggler, avocat spécialiste FSA droit de la construction et de l’immobilier et Simon Varin, avocat et collaborateur scientifique à l’Université de Neuchâtel.

Sur le site immodroit.ch, vous trouverez la jurisprudence du Tribunal fédéral ainsi que des analyses de texte qui vous permettront de mieux comprendre les évolutions dans ces domaines.

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Analyse de l'arrêt ATF 148 III 343, TF 4A_179/2021

Mathieu Singer

Mathieu Singer

MLaw, brevet d’avocat, assistant doctorant à l’Université de Neuchâtel

  • ATF 148 III 343, TF 4A_179/2021 du 20 mai 2022

Analyse de l'arrêt du Tribunal fédéral 4A_179/2021 du 20 mai 2022

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Analyses

ATF 148 III 343, TF 4A_179/2021 du 20 mai 2022

Responsabilité pour l’exploitation d’un chemin de fer; causalité adéquate, interruption, faute grave de la personne lésée; art. 40b al. 1 et 40c al. 2 let. b LCdF; 38 al. 1 LCR; 47 al. 2 1re phr. OCR

Le détenteur d’une entreprise ferroviaire répond du dommage causé par la réalisation d’un risque d’exploitation (art. 40b al. 1 LCdF). Il est dégagé de cette responsabilité si un fait qui ne lui est pas imputable, tel que la faute grave du lésé (art. 40c al. 2 let. b LCdF), a contribué à causer le dommage d’une façon si intense qu’il doit en être considéré comme la cause principale (art. 40c al. 1 LCdF). Le comportement d’un tiers constitue une cause principale seulement s’il présente un degré d’efficacité tellement élevé, s’il se situe à tel point en dehors du cours normal des choses, que la responsabilité causale du détenteur de l’entreprise ferroviaire n’est plus appréciée comme juridiquement pertinente à l’égard du dommage survenu. Ce comportement du tiers ne peut rompre le lien de causalité adéquate que si cette cause supplémentaire est si extérieure au déroulement normal des événements qu’on ne pouvait pas s’y attendre (c. 3.1-3.2).

La violation de la diligence résulte de la comparaison entre le comportement effectif de l’auteur de l’acte et le comportement hypothétique d’une personne moyennement diligente, la faute étant d’autant plus grave que l’écart par rapport au comportement moyen est important (c. 3.3).

Le tramway a en principe la priorité sur le piéton (art. 38 al. 1 LCR), même sur les passages pour piétons (art. 47 al. 2 1re phr. OCR). Tant que le conducteur du tramway n’enfreint ni la signalisation, ni les règles de circulation, et qu’il n’y a pas de défaillance technique, le piéton est en principe fautif en cas de collision (c. 3.4). Cette faute est grave, au sens de l’art. 40c al. 2 let. b LCdF, dans le cas d’un lésé familier des lieux, happé par un tram après s’être brusquement engagé sur les rails, en prêtant attention à son téléphone portable, sans avoir regardé, suivant une règle de prudence élémentaire, à gauche si un tram arrivait (c. 4.3).

Auteur : Alexandre Bernel, avocat à Lausanne et à Aigle

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Responsabilité chemin de fer Causalité Analyse Publication prévue

ATF 148 I 145, TF 2C_704/2021 du 12 mai 2022

Responsabilité de l’Etat; prescription, dies a quo, conditions de détention illicites; art. 7 LRECA-VD

Selon l’art. 7 de la loi vaudoise sur la responsabilité de l’Etat (LRECA-VD), la créance en dommages-intérêts à l’encontre de l’Etat se prescrit par un an dès la connaissance du dommage et en tout cas par dix ans dès l’acte dommageable. Le TF rappelle que cette disposition doit être interprétée à la lumière de la jurisprudence rendue à propos de l’art. 60 al. 1 CO, dont le texte est pratiquement identique. De jurisprudence constante, la notion de « connaissance du dommage » ne doit pas être appliquée de manière stricte, particulièrement lorsqu’elle correspond au dies a quo d’un délai de prescription très bref, comme en l’espèce.

Le TF relève ensuite qu’un détenu ayant souffert de conditions de détention illicites dans un établissement carcéral ne peut exclure le risque de subir à nouveau un traitement similaire à l’avenir. En l’absence de toute garantie quant à la pérennité de l’amélioration de sa situation, le détenu ne peut en aucun cas réaliser que le traitement carcéral illicite dont il a été victime a durablement pris fin ni prendre la mesure de son préjudice maximal.

En admettant que le délai de prescription avait commencé à courir le 12 janvier 2018, le Tribunal cantonal a en réalité fixé le moment de la connaissance du dommage d’un point de vue rétrospectif. Cette interprétation se heurte néanmoins à la jurisprudence constante rendue à propos de l’art. 60 al. 1 CO, selon laquelle le délai de prescription ne commence à courir qu’à partir du moment où le lésé a une connaissance effective du dommage. Or, tel ne peut être le cas, en l’espèce, qu’à partir du moment où le détenu a été transféré dans une autre prison, le 30 juillet 2018. Un détenu ayant subi des conditions de détention illicites ne peut en effet pas avoir une connaissance effective de son dommage avant d’avoir quitté l’établissement concerné. Le délai de prescription relatif qui présuppose la connaissance effective du dommage ne commence donc pas encore à courir au moment de l’amélioration des conditions de détention au sein d’un même établissement.

Le Tribunal cantonal aurait donc dû retenir que le délai de prescription d’une année n’avait pas commencé à courir avant le 30 juillet 2018. Dès lors, la prescription n’était pas encore acquise lorsque l’Etat de Vaud a renoncé, le 29 juillet 2019, à se prévaloir de la prescription jusqu’au 31 juillet 2020. L’arrêt attaqué repose ainsi sur une interprétation manifestement insoutenable de l’art. 7 LRECA-VD, tant dans son principe que dans son résultat, de sorte que le grief de violation de l’arbitraire est fondé. Partant, le recours est admis. L’affaire est renvoyée au Tribunal d’arrondissement pour nouvelle décision.

Auteur : Bruno Cesselli, expert à Bulle

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Responsabilité de l’Etat Publication prévue

TF 6B_315/2020 du 18 mai 2022

Responsabilité aquilienne; faute, causalité, mise en danger par négligence en violation des règles de l’art de construire, lésion corporelles graves par négligence; art. 229 CP; 125 al. 2 CP; 11 OPA

Un grutier A. a été chargé de transporter un élément en béton d’environ dix tonnes depuis son lieu de stockage jusqu’à sa position finale. A cet endroit et selon les instructions de C., l’entrepreneur chargé du montage, a déposé l’élément en béton sur son côté longitudinal le plus étroit (20 cm) sur une plateforme élévatrice et a desserré les chaînes qui sécurisaient le bloc. Celui-ci est resté un certain temps jusqu’à ce qu’il tombe et heurte la plateforme élévatrice qui, à son tour, a poussé contre la façade de l’immeuble un travailleur présent sur le chantier, lequel a subi des lésions corporelles importantes. Le grutier est condamné pour lésions corporelles graves par négligence (art. 125 al. 2 CP) et violation des règles de l’art de construire (art. 229 CP). Il recourt jusqu’au TF contre cette condamnation, invoquant principalement que la responsabilité de l’arrimage du chargement incombait à C.

Le TF rappelle que l’infraction visée à l’art. 229 CP consiste en l’inobservation des règles reconnues du droit de la construction. L’art. 229 CP instaure une position de garant de l’auteur, en ce sens qu’il oblige les personnes qui créent un danger dans le cadre de la direction ou de l’exécution de travaux à respecter les règles de sécurité dans leur domaine de compétence. Il convient ainsi de déterminer pour chaque cas individuel l’étendue des tâches et donc du domaine de compétence. Il faut, à cet égard, se référer aux prescriptions légales, aux accords contractuels, aux fonctions exercées, ainsi qu’aux circonstances du cas d’espèce. Les usages dans le secteur de la construction doivent également être pris en compte, même s’ils ne règlent qu’une éventuelle responsabilité civile. La distinction entre les différents domaines de compétences est une conséquence de la division du travail, qui est inévitable dans le domaine de la construction, dans lequel les différentes activités ne peuvent souvent pas être délimitées de manière claire les unes par rapport aux autres, de sorte qu’en cas de violation constatée des règles de l’art de la construction, la responsabilité pénale selon l’art. 229 CP incombe souvent à plusieurs personnes en même temps (c. 6.3). Ces principes sont transposables aux éléments constitutifs de l’art. 125 al. 2 CP. En particulier, la position de garant peut être fondée sur les mêmes considérations que pour l’art. 229 CP.

S’agissant d’un grutier, il convient de se référer à l’ordonnance sur les conditions de sécurité régissant l’utilisation des grues qui prévoit, à son art. 6 al. 1, que les charges doivent être assurées pour le levage, arrimées aux crochets des grues et déposées après le levage, de sorte qu’elles ne puissent pas se renverser, tomber ou glisser et par là, constituer un danger. Lorsque l’ordonnance sur les grues ne prévoit rien, c’est l’ordonnance sur la prévention des accidents (OPA) qui s’applique. Son art. 11 al. 1 indique que l’employé est tenu d’observer les règles de sécurité généralement reconnues (c. 6.3.1).

Il convient de retenir en l’espèce une violation des règles de l’art de construire par le grutier. La répartition du travail entre ce dernier et C., en tant que chef d’équipe et instructeur, ne permet pas, dans les circonstances du cas d’espèce, de décharger le grutier. Dans son activité, celui-ci doit tenir compte des règles de sécurité généralement reconnues et doit immédiatement remédier aux éventuels défauts constatés qui portent atteinte à la sécurité du travail, conformément à l’art. 11 al. 1 OPA. En l’espèce, le grutier, vu qu’il se trouvait en hauteur, était en mesure de voir les dimensions et la position de l’élément en béton et de reconnaître le risque de basculement et l’état de fait dangereux ainsi créé. En omettant, malgré le « défaut » qu’il a constaté et qui porte atteinte à la sécurité du travail, de prendre ou de faire prendre les mesures de protection nécessaires pour l’éliminer, il n’a pas respecté les règles reconnues de l’art de construire. Le comportement fautif de C. n’était par ailleurs pas exceptionnel au point de rompre le lien de causalité entre la violation du devoir de diligence du grutier et la survenance du résultat.

Auteure : Maryam Kohler, avocate à Lausanne

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Responsabilité du maître de l’ouvrage

TF 6B_491/2021 du 23 mai 2022

Responsabilité médicale; intervention dentaire, lésions corporelles, degré de gravité, pluralité d’auteurs, causalité; art. 125 CP

Une patiente, avec un lourd passif médical et au bénéfice d’une rente AI, recourt auprès du TF à l’encontre d’un acquittement prononcé en faveur de deux dentistes ayant eu à répondre de lésions corporelles graves par négligence. A cette occasion, le TF rappelle que les interventions médicales réalisent les éléments constitutifs objectifs d’une lésion corporelle en tout cas si elles touchent à une partie du corps (par exemple lors d’une amputation) ou si elles lèsent ou diminuent, de manière non négligeable et au moins temporairement, les aptitudes ou le bien-être physiques du patient. Cela vaut même si ces interventions étaient médicalement indiquées et ont été pratiquées dans les règles de l’art.

Pour que les lésions corporelles soient considérées comme graves, l’atteinte doit être permanente, c’est-à-dire durable et non limitée dans le temps ; il n’est en revanche pas nécessaire que l’état soit définitivement incurable et que la victime n’ait aucun espoir de récupération. Il faut procéder à une appréciation globale : plusieurs atteintes, dont chacune d’elles est insuffisante en soi, peuvent contribuer à former un tout constituant une lésion grave. Il faut tenir compte d’une combinaison de critères liés à l’importance des souffrances endurées, à la complexité et la longueur du traitement, à la durée de la guérison, respectivement de l’arrêt de travail, ou encore à l’impact sur la qualité de vie en général.

Lorsque plusieurs individus ont, indépendamment les uns des autres, contribué par leur négligence à créer un danger dont le résultat incriminé représente la concrétisation, chacun d’entre eux peut être considéré comme un auteur de l’infraction, que son comportement représente la cause directe et immédiate du résultat ou qu’il l’ait seulement rendu possible ou favorisé.

Dans le cas d’espèce, le TF confirme l’acquittement en retenant que les lésions corporelles, à savoir la dévitalisation et l’extraction de dents, n’étaient pas graves et que le lien de causalité faisait défaut.

Auteur : Yvan Henzer, avocat à Lausanne

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Responsabilité médicale

TF 6B_1295/2021 du 16 juin 2022

Responsabilité aquilienne; homicide par négligence, personnel soignant, faute, position de garant, devoir de prudence, gravité des manquements, infraction de commission; art. 11 al. 1 et 2 ainsi que 117 CP

Un comportement constitutif d’une négligence consiste en général en un comportement actif, mais peut aussi avoir trait à un comportement passif contraire à une obligation d’agir (cf. art. 11 al. 1 CP). Reste passif en violation d’une obligation d’agir celui qui n’empêche pas la mise en danger ou la lésion d’un bien juridique protégé par la loi pénale bien qu’il y soit tenu à raison de sa situation juridique, notamment en vertu de la loi, d’un contrat, d’une communauté de risque librement consentie ou de la création d’un risque (art. 11 al. 2 let. a-d CP). N’importe quelle obligation juridique ne suffit pas. Il faut qu’elle ait découlé d’une position de garant, c’est-à-dire que l’auteur se soit trouvé dans une situation qui l’obligeait à ce point à protéger un bien déterminé contre des dangers indéterminés (devoir de protection), ou à empêcher la réalisation de risques connus auxquels des biens indéterminés étaient exposés (devoir de surveillance), que son omission peut être assimilée au fait de provoquer le résultat par un comportement actif.

Lorsqu’il s’agit d’apprécier le comportement adopté par le personnel soignant d’une institution de soins médicaux, qui a, dans le cas particulier, laissé la victime prendre son bain sans surveillance, la position de garant au sens de l’art. 11 al. 2 let. b CP est de toute manière donnée, dès lors qu’il est admis que les personnes travaillant dans ce domaine d’activité assument une obligation contractuelle de protection vis-à-vis de leurs patients.

Dans le cas d’espèce toutefois, compte tenu de l’état de santé et des limitations de la victime en raison de ses handicaps, lui donner le bain doit être considéré comme une activité dangereuse. L’élément déterminant qui doit être examiné se rapporte ainsi au fait d’accomplir l’activité en cause sans observer les mesures de sécurité suffisantes. Il y a donc lieu de retenir en l’occurrence que l’on se trouvait en présence d’un comportement actif, soit d’une infraction de commission.

Pour le surplus, s’il est clair que l’absence de directives concernant le déroulement des bains a certainement favorisé les manquements du recourant, il n’empêche que ce dernier, qui était au bénéfice d’une formation professionnelle spécialisée, était parfaitement conscient de la dépendance totale de la victime, de la dégradation de son état de santé, et du fait que, peu avant les faits, elle avait présenté des épisodes de spasmes, fait l’objet d’une crise d’épilepsie, ainsi que de mouvements incontrôlés en lien avec la douleur, et qu’elle était récemment tombée de son fauteuil. Or, malgré cela, il a, avec son collègue, placé la victime dans un bain – soit une activité à risque dans le cas de la victime – certes avec une « cigogne », mais avec une bouée insuffisamment gonflée, pour une durée de 30 minutes, sans aucune surveillance. Ce faisant, il a commis une violation fautive de son devoir de prudence au sens de la jurisprudence relative à l’art. 117 CP.

Auteur : Gilles-Antoine Hofstetter, avocat à Lausanne

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Responsabilité aquilienne

ATF 148 V 311, TF 8C_621/2021 du 18 mai 2022

Assurance-accidents; soins à domicile, prestataire de soins sans convention tarifaire, tarif applicable; art. 56 LAA

Un assureur-accidents doit prendre en charge le coût des prestations d’un fournisseur de prestations de soins à domicile admis à pratiquer, même lorsque celui-ci n’a ni signé, ni adhéré à une convention tarifaire. A juste titre, les juges fédéraux ont considéré que l’art. 56 LAA n’a pas pour but de limiter le choix du fournisseur de prestations, contrairement à ce qu’invoquait l’assureur-accidents, cette question étant exclusivement réglée aux art. 10 LAA et 18 OLAA. S’agissant du tarif à prendre en considération, le TF a précisé que, en faisant usage de l’art. 15 al. 2 OLAA par analogie, l’assureur-accidents devait rembourser les frais qu’il aurait dû prendre en charge, sur la base de la convention en vigueur.

Auteur : Guy Longchamp, avocat, chargé d’enseignement à l’Université de Neuchâtel

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Assurance-accidents Publication prévue

ATF 148 V 334, TF 9C_543/2021 du 20 juillet 2022

Prévoyance professionnelle; rente d’orphelin, surindemnisation, notion de formation; art. 22 al. 3 LPP

Le TF a rappelé que l’art. 22 al. 3 let. a LPP subordonne le maintien du droit aux prestations pour orphelin après que l’ayant droit a atteint l’âge de 18 ans à la poursuite d’une formation (« tant que l’orphelin fait un apprentissage ou des études »). A la différence de l’art. 25 al. 3 LAVS, l’art. 22 al. 3 LPP ne délègue pas au Conseil fédéral la compétence de définir ce que l’on entend par formation. Les juges fédéraux ont considéré qu’il était possible d’appliquer les art. 25 al. 3 LAVS et 49bis RAVS par analogie, s’agissant du critère « qualitatif » de la formation. En revanche, une telle application ne se justifiait pas en ce qui concerne le critère « quantitatif » de la formation, à savoir la fixation d’une limite forfaitaire en francs qui serait applicable de manière schématique. Le TF a toutefois réservé une situation dans laquelle une personne orpheline consacrerait la plus grande partie de son temps à l’exercice d’une activité lucrative tout en restant inscrit dans un cursus de formation pour ne pas perdre son droit.

Note :

Cette jurisprudence doit être nuancée, en ce sens qu’il importe d’examiner systématiquement les règlements de prévoyance des institutions de prévoyance (dans le domaine de la prévoyance professionnelle surobligatoire, y compris les plans enveloppants)

Auteur : Guy Longchamp, avocat, chargé d’enseignement à l’Université de Neuchâtel

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Prévoyance professionnelle Publication prévue

ATF 148 V 321, TF 8C_104/2021 du 27 juin 2022

Assurance-invalidité; troubles psychiques, indicateurs, revenu d’invalide, ESS, abattement, révision ou suppression de la rente, réadaptation, limite de 55 ans, moment déterminant; art. 7 et 8 LPGA; 4 LAI

Dans le cadre de l’évaluation du caractère invalidant de troubles psychiques, le TF revoit l’analyse des indicateurs de l’ATF 141 V 281 faite par les juges cantonaux, et ne trouve rien à y redire (c. 5.1). Il rejette également le grief d’arbitraire s’agissant de l’évaluation du caractère invalidant de ces troubles pour la période antérieure à l’expertise (c. 5.2).

Lorsque, comme en l’espèce, la personne assurée a travaillé de longues années dans un secteur économique déterminé (la construction dans ce cas) et qu’un travail dans un autre secteur économique paraît illusoire, il est correct de déterminer le salaire d’invalide en se fondant sur l’ESS, TA1, rubrique « total », plutôt que par référence aux moyennes dans les différentes branches (c. 6.3).

Le TF confirme l’abattement de 10 % sur le revenu d’invalide, déjà opéré par l’office AI et confirmé par les premiers juges, qui tient compte de ce que le rendement de la personne assurée est limité pour des raisons médicales, en l’espèce un diabète et des troubles du sommeil (c. 6.4).

Motif pour sa publication à venir, l’arrêt tranche la question du moment à prendre en considération pour savoir si la personne assurée, âgée de 55 ans, doit se voir proposer des mesures de réadaptation avant la baisse ou la suppression de sa rente, ou si l’on peut attendre d’elle qu’elle se réadapte par ses propres moyens. Cette question a jusqu’ici été laissée ouverte, l’arrêt de principe (cf. ATF 145 V 209) ayant mentionné trois moments possibles : la date de la décision administrative, la date depuis laquelle la rente est révisée vers le bas ou supprimée, et la date de l’évaluation médicale. En l’espèce, cette question ne peut rester ouverte car la personne assurée était âgée de 55 ans au moment de l’évaluation médicale puis de la décision administrative, mais n’était en revanche âgé que de 52 ans à la date depuis laquelle la rente a été supprimée.

Le TF, considérant qu’il n’y a pas lieu de traiter différemment la situation dans laquelle une rente limitée dans le temps (ou une rente diminuant au fil du temps) est accordée rétroactivement et une révision du droit à la rente selon l’art. 17 LPGA, retient que c’est la date à laquelle la décision administrative est rendue qui est déterminante. En effet, au moment de l’évaluation médicale, le droit à la rente n’a pas encore été entièrement examiné, et le moment de la diminution, respectivement de la suppression de la rente n’est connu que bien après (c. 7.3). En l’espèce, la personne assurée était âgée de 55 ans au moment où la décision administrative a été rendue, de sorte qu’il était nécessaire d’instruire la question de la possibilité d’une réadaptation par soi-même, et, le cas échéant, de mettre en œuvre des mesures de réadaptation, avant de pouvoir statuer définitivement. Le recours est donc admis.

Auteure : Anne-Sylvie Dupont

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Assurance-invalidité Publication prévue

L'actualité liée aux prestations sociales accordées dans le cadre de la législation corona


L'actualité liée aux prestations sociales accordées dans le cadre de la législation corona

TF 9C_91/2022 du 22 juin 2022

APG-COVID; notion de « perte de gain ou de salaire », subsidiarité de l’allocation Covid-19, art. 2 al. 3bis O APG COVID-19; 31 al. 3 let. b et c LACI

La société A. SA est active dans le domaine de l’événementiel. Depuis 2016, B. est le seul membre du conseil d’administration de A. SA, ainsi que le directeur de celle-ci. Quant à C., l’épouse de B., elle est employée par A. SA en qualité de collaboratrice. La Caisse de compensation de Lucerne a versé à C. une allocation pour perte de gain en lien avec les mesures COVID-19 pour la période du 1er juin au 16 septembre 2020. La caisse a encore reconnu un droit à dite allocation pour la période du 17 septembre au 30 novembre 2020 mais elle a ensuite nié un tel droit pour la période du 1er décembre 2020 au 30 avril 2021, par décision du 27 mai 2021 puis décision sur opposition du 7 juillet 2021. A. SA fait recours contre cette décision, que rejettent tant le Tribunal cantonal de Lucerne que le TF.

Le TF laisse ouverte la question de la qualité pour recourir de l’employeur dans les cas particuliers d’allocations perte de gain COVID-19, question qu’il a déjà laissée ouverte à l’arrêt 9C_356/2021.

L’art. 2 al. 3bis O APG COVID-19 du 20 mars 2020 (RS 830.31) s’applique ici dans sa version entrée en vigueur avec effet rétroactif au 17 septembre 2020, et valable jusqu’au 16 février 2022 (ci-après : art. 2 al. 3bis).

Le Tribunal cantonal a qualifié C. d’ayant droit au sens de l’art. 31 al. 3 let. c LACI, respectivement de l’art. 2 al. 3bis O APG COVID-19. Il a en outre constaté qu’A. SA avait versé à C. son salaire durant toute la période litigieuse. En l’absence de perte de salaire (selon l’art. 2 al. 3bis let. b de dite ordonnance), les juges cantonaux ont donc nié tout droit à l’indemnité de perte de gain. Le TF estime ce jugement conforme au droit fédéral.

Le TF rappelle que le droit à l’allocation perte de gain COVID-19 des personnes assurées ayant une position similaire à celle d’un employeur est subsidiaire au maintien du salaire par l’employeur (cf. arrêt 9C_356/2021 du 10 mai 2022). Par arrêt 9C_448/2021, rendu le 10 mai 2022 lui aussi, le TF a par ailleurs conclu que cette subsidiarité du droit à l’allocation par rapport au maintien du salaire s’appliquait également au-delà du 17 septembre 2020.

Auteur : Philippe Graf, avocat à Lausanne

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APG COVID

Brèves...

Un ressortissant allemand âgé de 60 ans, domicilié en Suisse, au bénéfice d’une rente du 1er pilier liechtensteinoise et d’une rente d’une institution allemande de prévoyance professionnelle, n’a pas droit aux prestations complémentaires en Suisse tant qu’il n’a pas atteint l’âge donnant droit, en Suisse, à la rente AVS (N 6001 CIBIL et N 2230.01 DPC). La convention bilatérale de sécurité sociale CH-FL ainsi que la Convention AELE ne sont pas applicables, faute pour le recourant de posséder la nationalité d’un Etat membre (TF 9C_85/2022).

Lorsque des mesures de réadaptation ne sont objectivement pas possibles en raison de l’évolution de l’état de santé de la personne assurée, non stabilisé, cette dernière a droit à une rente si le taux d’invalidité est suffisant à l’issue du délai d’attente. Le taux d’invalidité correspond alors à la perte de gain dans une activité adaptée établie avant les mesures de réadaptation (TF 9C_559/2021).

Lorsqu’une personne assurée atteinte de troubles psychiques a demandé, concomitamment, l’octroi d’une rente AI et d’une allocation pour impotent (API, il ne peut être statué sur le droit à cette dernière tant que le droit à la première n’est pas connu ; en effet, le droit à un quart de rente est, dans une telle situation, l’une des conditions du droit à l’API. Il est donc légitime de requérir et d’obtenir la suspension de la procédure judiciaire portant sur la question de l’API jusqu’à droit connu sur celle de la rente (TF 9C_640/2021).

Le comportement du cycliste qui, remontant dans la mauvaise direction une rue à sens unique et débouchant sur une route sur laquelle circule un tram, freine brusquement pour éviter la collision, perd la maîtrise de son vélo, chute sur les rails et se fait traîner sur plusieurs mètres, est seul à l’origine du dommage, le lien de causalité adéquate entre l’exploitation du tram et la survenance de l’accident étant interrompu (TF 4A_91/2022. Cf. également arrêt du mois et l’analyse de Mathieu Singer dans cette édition).

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