NLRCAS Avril 2021
Editée par Christoph Müller, Anne-Sylvie Dupont, Guy Longchamp et Alexandre Guyaz
TF 2C_404/2020 du 16 décembre 2020
Assurance-maladie; assurance obligatoire des soins, libre choix de l’hôpital, déduction fiscale des frais provoqués par la maladie; art. 41 al. 3 LAMal; 7 ss LHID
Dans un arrêt relatif à une problématique d’ordre fiscal, le TF, contrairement au Tribunal administratif du canton d’Argovie, a considéré que les coûts consécutifs au choix d’un assuré ne bénéficiant pas d’une couverture d’assurance complémentaires selon la LCA de se faire soigner – pour des raisons médicales (art. 41 al. 3 LAMal) – dans une clinique privée extra-cantonale pouvaient être déduits fiscalement. Dans le cas d’espèce, seuls les frais médicaux ont toutefois été considérés comme déductibles, à l’exclusion des frais hôteliers.
Auteur : Guy Longchamp
TF 4A_362/2020 du 22 janvier 2021
Responsabilité du propriétaire foncier; prescription, dies a quo, abus de droit; art. 60 al. 1 CO; art. 2 al. 2 et 679 CC
Le litige oppose N. B. et C. B. (ci-après : les intimés), propriétaires d’un bâtiment, et A. (ci-après : le recourant), propriétaire d’un bâtiment mitoyen. A la suite d’un sinistre dû à un dégât d’eau, l’architecte C., mandaté par les intimés, rend un rapport le 13 janvier 2014 aux termes duquel le dommage doit être assumé à 85 % par A., qui conteste le rapport. Les parties confient d’un commun accord un mandat d’expertise à D. Selon le rapport de ce dernier, du 26 février 2015, A. est exonéré de toute responsabilité. La contre-expertise, établie par l’architecte C., retient que le dommage doit être majoritairement assumé par A., le solde par N. B. et C. B. Cette expertise, assortie d’une mise en demeure, est communiquée le 21 mai 2015 par les intimés à A. Ils requièrent une poursuite le 15 juin 2015 et ouvrent action le 26 août 2016. L’exception de prescription est rejetée en première et en deuxième instance. Les juges cantonaux ont retenu l’abus de droit. Le fait, pour le recourant, de mandater un expert d’un commun accord avec les intimés constituait une démarche qui avait incité ces derniers à ne pas se préoccuper de l’interruption du délai de prescription. L’exception de prescription n’a donc pas été admise, motif du recours au TF.
Dans sa teneur en vigueur jusqu’au 1er janvier 2020 (art. 49 al. 1 Tit. fin. CC), la prescription relative est d’un an à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne qui en est l’auteur (c. 3 ; c. 4.1.1).
En l’espèce, la Cour cantonale n’a pas méconnu ces principes en retenant que les intimés avaient eu une connaissance suffisante du dommage ainsi que de la personne responsable à réception du premier rapport de leur architecte, daté du 13 janvier 2014. A ce titre, le rapport de D. respectivement la contre-expertise de C. ne leur est d’aucun secours s’agissant du dies a quo du délai de prescription (c. 4.2).
Reste à examiner si le grief de l’abus de droit, retenu par la Cour cantonale, résiste à l’examen (c. 5 et 5.1). En l’espèce, les intimés devaient envisager que l’expert en cause exprime un avis divergeant et devaient soit obtenir une renonciation expresse à invoquer la prescription de la partie adverse, soit interrompre le cours de celle-ci, ce qu’ils ont fait ultérieurement – mais tardivement – en requérant une poursuite à son encontre. Leur retard à agir n’est objectivement pas compréhensible. Partant, il n’y a rien d’abusif pour le recourant à invoquer la prescription de la créance en dommages-intérêts. Contrairement à ce qu’avancent les intimés en invoquant l’équité, cette institution n’est pas ici détournée de son but. Le grief du recourant s’avère bien fondé (c. 5.2).
La prescription d’un an qui a débuté le 14 janvier 2014 est ainsi échue le 14 janvier 2015 sans avoir été interrompue. Elle fait ainsi échec à l’exigibilité de la créance invoquée par les intimés (c. 5.3).
Auteur : Philippe Eigenheer, avocat à Genève et Vaud
TF 4A_619/2020 du 17 février 2021
Responsabilité aquilienne; procédure, théorie des faits de double pertinence, décision incidente, incompétence ratione loci; art. 92 et 93 LTF; 59 al. 2 let. b CPC
Une banque assigne une société russe en paiement d’une somme d’argent par-devant la Chambre patrimoniale cantonale vaudoise. La défenderesse dépose une requête visant à ce que le tribunal limite la procédure à la seule question de sa compétence à raison du lieu. A ce titre, elle argue que les prétentions de la demanderesse ne reposent pas sur un acte illicite mais sur la responsabilité fondée sur la confiance, ce dernier chef n’étant selon elle pas prévu par la LDIP. De ce fait, la partie défenderesse estime que les faits allégués par la demanderesse ne permettent pas de fonder la compétence de l’autorité saisie et qu’il n’existe, par conséquent, aucun for en Suisse. La Chambre patrimoniale cantonale vaudoise ainsi que la Chambre des recours civile du Tribunal du canton de Vaud considèrent qu’il s’agit d’un fait de double pertinence. Les juges cantonaux considèrent ainsi que cette question ne pourra être tranchée qu’après l’administration des preuves et rejettent dès lors le recours de la société russe. La partie défenderesse recourt au TF.
A titre préliminaires, les juges fédéraux relèvent plusieurs principes jurisprudentiels s’inscrivant dans le cadre de la théorie de la double pertinence. Le TF estime que le tribunal doit statuer d’entrée de cause sur sa compétence (art. 59 al. 2 let.b CPC) et déterminer s’il a affaire à des faits simples ou des faits doublement pertinents. Les faits sont dits simples s’ils sont déterminants uniquement pour la compétence (par ex. la localisation de l’acte illicite qui est sans pertinence pour le bien-fondé de la prétention au fond). De tels faits doivent être prouvés lorsque le défendeur conteste les allégués du demandeur et soulève ainsi l’exception déclinatoire.
Les faits sont dits de double pertinence lorsque ceux-ci sont à la fois pertinents pour trancher la question de la compétence du tribunal mais aussi du bien-fondé de l’action (par ex. lorsque le for a pour condition l’existence d’un acte illicite ou d’un contrat). Les faits de double pertinence n’ont pas à être prouvés mais sont censés être établis sur la seule base des écritures du demandeur : le juge examinera sa compétence uniquement sur la base des allégués, moyens et conclusions de la demande, sans tenir compte des objections de la partie défenderesse et sans procéder à aucune administration de preuve. Toutefois, bien que les faits doublement pertinents ne doivent pas être prouvés, le juge doit tout de même examiner s’ils sont concluants, c’est-à-dire s’ils permettent de déterminer le for invoqué par le demandeur (question de droit).
La théorie de la double pertinence, critiquée par une partie de la doctrine, autorise ainsi le juge saisi à admettre sa compétence sans en vérifier toutes les conditions, et peut ainsi se déclarer compétent alors même que l’existence d’un acte illicite n’est pas établie. Le TF considère que la théorie de la double pertinence est justifiée dans son résultat : dans le cas où, après l’administration des preuves, le juge rejette l’action au fond en raison de la constatation de l’absence de compétence en raison de l’inexistence du fait de double pertinence, le jugement sera revêtu de l’autorité de chose jugée et le demandeur qui a choisi d’introduire son action à un for spécial n’aura alors pas d’intérêt à pouvoir ensuite le porter au for ordinaire ou à un autre for spécial.
La recourante soutient que l’arrêt attaqué, confirmant la décision incidente de la Chambre patrimoniale cantonale, est susceptible d’un recours immédiat au TF en vertu de l’art. 92 al. 1 LTF. La Haute Cour rejette cette argumentation, relevant que les juges cantonaux n’ont pas rendu de décision visant à trancher effectivement et définitivement la question de sa compétence. Au surplus, la juridiction cantonale a souligné que l’administration des preuves sur les faits doublement pertinents se ferait lors de l’examen du bien-fondé de la prétention au fond. Dite décision cantonale doit ainsi être considérée comme un refus de statuer par une décision séparée sur la compétence : les juges fédéraux estiment que cette décision ne constitue pas une décision incidente sur la compétence au sens de l’art. 92 al. 1 LTF mais au sens de l’art. 93 LTF. Par ailleurs, le TF estime qu’il n’existe pas de préjudice irréparable au sens de l’art. 93 al. 1 let. a LTF, relevant au surplus que le justiciable ne dispose en principe pas d’un droit à obtenir une décision séparée sur la compétence.
Le recours est ainsi déclaré irrecevable.
Auteur : Christian Grosjean, avocat à Genève
TF 6B_484/2020 du 21 janvier 2021
Responsabilité aquilienne; tort moral; art. 47 CO
Aux termes de l’art. 47 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles ou, en cas de mort d’homme, à la famille une indemnité équitable à titre de réparation morale. Les frères et sœurs comptent parmi les membres de la famille qui peuvent prétendre à une indemnité pour tort moral. Cependant, ce droit dépend des circonstances et la pratique en la matière est plutôt restrictive. Le fait de vivre sous le même toit est en particulier un indice important de l’intensité de la relation pouvant exister dans une fratrie, ce qui peut ainsi ouvrir le droit à une indemnisation. Si tel n’est pas le cas au moment du décès du frère ou de la sœur, l’allocation d’une indemnité pour tort moral n’est envisageable qu’en présence de contacts très étroits, seuls susceptibles d’occasionner des souffrances morales exceptionnelles.
Dans le cas d’espèce, l’allocation d’une indemnité pour tort moral en faveur de sœurs adultes âgées 60 à 70 ans n’entretenant avec la défunte que très peu de contacts depuis plusieurs années doit ainsi être refusée.
Auteur : Yvan Henzer, avocat à Lausanne
TF 9C_139/2020 du 10 février 2021
Assurance-vieillesse et survivants; coordination européenne, sous-traitance, rattachement, statut des travailleurs; art. 11 à 13 R (CE) n° 883/2004
Le litige concerne l’obligation, pour une entreprise helvétique du secteur de la construction, de payer en Suisse des cotisations sociales pour les employés d’une entreprise portugaise à laquelle elle avait confié des travaux en sous-traitance qui ont été effectués en Suisse.
L’absence d’attestation A1 délivrée par l’organisme portugais de sécurité sociale empêche de considérer que les travailleurs en question soient reconnus comme des travailleurs détachés au sens de l’art. 12 R (CE) n° 883/2004. L’entreprise recourante n’apporte par ailleurs pas la preuve que les travailleurs portugais auraient exercé des activités au Portugal également, concomitamment à leur activité en Suisse. L’art. 13 R (CE) n° 883/2004 ne s’applique ainsi pas non plus. En conséquence, la situation doit être résolue en appliquant le principe général de l’art. 11 par. 3 let. a R (CE) n° 883/2004, selon lequel la personne qui exerce une activité salariée ou non salariée dans un Etat membre est soumise à la législation de cet Etat membre. Le droit suisse est donc applicable (c. 4.1).
Qualifier les travailleurs concernés de travailleurs dépendants ou indépendants doit se faire à la lumière du droit suisse. En l’espèce, ils sont qualifiés de travailleurs dépendants, faute d’éléments suffisants permettant de conclure à une situation d’indépendance (c. 4.2).
Auteure : Anne-Sylvie Dupont
TF 9C_196/2020 du 8 février 2021
Assurance-vieillesse et survivants; obligation de cotiser, appréciation anticipée des preuves, violation du droit d’être entendu, arbitraire, activité dépendante ou indépendante; art. 29 al. 2 Cst.
Le point de savoir si la rétribution versée par une société à l’un de ses administrateurs, en l’occurrence un avocat exerçant également comme indépendant, doit être qualifiée de salaire ou d’honoraires dépend de l’existence – ou non – d’un lien de dépendance envers la société.
L’autorité judicaire ne peut à cet égard refuser, sous peine de verser dans l’arbitraire et par conséquent violer le droit d’être entendu de la personne rémunérée, d’auditionner des témoins en mesure de s’exprimer sur la nature de ses rapports professionnels avec la société qui le rétribue.
Auteur : Gilles-Antoine Hofstetter, avocat, Lausanne
TF 9C_412/2020 du 1 février 2021
Prestations complémentaires; revenus déterminants, pension étrangère, taux de change; ALCP; R (CE) n° 883/2004 et 987/2009
L’assurée, au bénéfice d’une rente de vieillesse AVS depuis le 1er janvier 2003 et percevant également une pension de l’Istituto Nazionale Previdenza Sociale (INPS) de Rome, en raison de son statut de veuve d’un ressortissant italien, fait valoir son droit à des prestations complémentaires. Celles-ci lui sont refusées au motif que ses revenus déterminants couvrent ses dépenses reconnues. Le litige concerne le taux de conversion de la rente italienne et le nombre de mensualités : la juridiction cantonale a retenu que la rente était versée 12 fois par an, alors que la caisse de compensation avait retenu qu’il y avait 13 mensualités ; la juridiction cantonale a retenu le taux de change appliqué de facto par la Banque cantonale neuchâteloise au cours du jour du change, soit 1.1119 au 10 décembre 2018, alors que la caisse de compensation avait appliqué le taux de conversion publié par la Banque centrale européenne au cours du jour du change (1.1295). La caisse de compensation recourt au TF contre l’arrêt de la juridiction cantonale.
Selon le TF, vu que la décision a été rendue après l’entrée en vigueur au 1er juin 2002 de l’ALCP et concerne une prétention postérieure à cette date, les Règlements (CE) n° 883/2004 et 987/2009, auxquels l’ALCP renvoie (art. 8 et 15 ALCP ; art. 1 al. 1 et section A de l’annexe II), sont applicables. Les prestations complémentaires relèvent du champ d’application matériel du R (CE) n° 883/2004 ; en sa qualité de veuve d’un ressortissant italien l’assurée entre dans le champ d’application personnel du même règlement. S’agissant de la conversion des monnaies, l’art. 90 R (CE) n° 987/2009 prévoit que le taux de change de référence est celui publié par la Banque centrale européenne et la date est fixée par la commission administrative (cf. annexe II ALCP, section B, point 8 : renvoi à la décision H3 de la commission administrative pour la coordination des systèmes de sécurité sociale du 15 octobre 2009 relative à la date à prendre en compte pour établir les taux de change visée à l’art. 90 du règlement). Selon cette décision et sauf disposition contraire de celle-ci, le taux de change est celui publié le jour où l’institution exécute l’opération en question, en l’occurrence le jour où l’institution de sécurité sociale italienne a exécuté l’opération bancaire (DPC N 3452.01).
Selon la jurisprudence, lorsque les droits sont calculés sur le seul fondement des législations nationales (par ex. la conversion en euros d’une rente AVS calculée uniquement selon le droit suisse en francs suisses), ni l’art. 90 du règlement précité ni la décision H3 ne sont applicables et les taux de conversion demeurent déterminés par la législation interne. En revanche, dans les situations nécessitant une coordination, telles celles où une rente ou une pension versée par une institution de sécurité sociale d’un Etat membre de l’UE doit être prise en compte dans le cadre de l’examen du droit à des prestations complémentaires à l’AVS ou à l’AI, les dispositions sur la conversion des monnaies du R (CE) n° 987/2009 et de la décision H3 trouvent application.
C’est donc la caisse de compensation qui a eu gain de cause sur le taux de conversion et aussi sur le nombre de mensualités versées, la décision de l’INPS faisant référence aux 12 mensualités de la rente AVS suisse et non à celles de la pension italienne.
Auteur : Séverine Monferini Nuoffer, avocate à Fribourg
TF 4A_488/2020 du 19 janvier 2021
Assurances privées; assurance perte de gain en cas de maladie, rentes AI, rentes LPP, surindemnisation, art. 26 al. 2 LPP
Un employé reçoit des indemnités journalières en cas de maladie pour une incapacité de travail totale depuis le 10 novembre 2014. En juin 2016, l’AI lui accorde une rente entière à partir du 1er novembre 2015. L’assureur perte de gain réduit son indemnité compte tenu de la rente AI. En septembre 2016, la caisse de pension alloue une rente d’invalidité fondée sur une incapacité à 100 %, à hauteur de CHF 4’840.- par mois à partir du 1er novembre 2015. Le courrier de la caisse précise que la rente ne peut pas être reportée jusqu’à l’épuisement du droit aux indemnités journalières maladie. Sur la base de cette décision, l’assureur perte de gain réduit les indemnités journalières et demande à l’assuré le remboursement de CHF 48’400.- au titre de surindemnisation pour la période de novembre 2015 à août 2016 (10 mois à CHF 4’840.-). Il ouvre action contre l’assuré devant le Tribunal administratif du canton de Schwytz, qui lui donne raison. L’assuré recourt devant le TF.
Le TF confirme implicitement l’appréciation du tribunal cantonal sur l’existence d’une clause de surindemnisation dans les conditions d’assurance perte de gain maladie. Il examine ensuite l’application de l’art. 26 al. 2 LPP, associé à l’art. 26 al. 2 OPP2, selon lequel l’institution de prévoyance peut prévoir dans son règlement que le droit aux prestations est différé aussi longtemps que l’assuré reçoit un salaire entier ou des indemnités perte de gain correspondant à 80 % du salaire financées pour moitié au moins par l’employeur. En l’espèce, le TF relève que l’assuré n’établit pas en quoi les conditions d’un report étaient réalisées et que l’autorité cantonale n’a pas violé la maxime d’office (art. 247 al. 2 let. a CPC) ni l’application du droit d’office (art. 57 CPC). L’ATF 142 V 466, qui renverse la jurisprudence et admet que le droit au report de la rente LPP existe aussi lorsque l’assureur perte de gain compense en partie les indemnités journalières avec le rétroactif de la rente AI, n’est par ailleurs d’aucune aide à l’assuré, dès lors qu’il ne démontre pas que les conditions du report étaient réalisées.
Enfin, le fait que l’institution de prévoyance n’a versé réellement à l’assuré que CHF 22’000.- sur les CHF 48’400.- dus pour la période du 1er novembre 2015 au 31 août 2016, le solde ayant été compensé avec une avance faite à l’assuré, n’est pas relevant non plus, dès lors que l’assuré ne conteste pas que le droit à la rente pour la même période est bien de CHF 48’400.- en tout.
Par conséquent, le recours de l’assuré est rejeté.
Auteure : Pauline Duboux, juriste à Lausanne
TF 8C_378/2020 du 21 janvier 2021
Assurance-accidents; rente d’invalide, révision, gain assuré; art. 24 al. 2 OLAA
L’art. 24 al. 2 OLAA ne trouve pas application en présence d’une révision de la rente d’invalidité (augmentation du degré d’invalidité). Le gain assuré déterminant à prendre en considération reste celui qui prévalait à la survenance du cas d’assurance et ne peut être revu dans le cadre d’une révision. Seule la procédure de l’opposition, lors de l’octroi initial de la rente d’invalidité, est ouverte pour contester la fixation du gain assuré déterminant (confirmation de la jurisprudence parue aux ATF 135 V 279).
Auteur : Guy Longchamp
TF 8C_145/2020 du 4 février 2021
LAA; assurance-accidents; art. 17, 53 al. 2 LPGA
Le Tribunal fédéral confirme sa jurisprudence (ATF 133 V 108 et 140 V 514) selon laquelle lorsqu’une rente d’invalidité est revue à la hausse ou à la baisse, la décision sur révision remplace la décision révisée. Il en va de même lorsque la rente attribuée est confirmée après un examen matériel du droit à une rente d’invalidité. Si, par la suite, la décision sur révision est à son tour révisée ou reconsidérée, la décision initiale ne renaît pas, sous réserve de la nullité de la décision sur révision. Par conséquent le droit à la rente doit être examiné librement pour le futur (« ex nunc et pro futuro »), même dans le cas où aucun titre de révocation n’existe en relation avec cette décision antérieure.
Auteur : Marlyse Cordonier, avocate à Genève
TF 9C_52/2020 du 1 février 2021
Prévoyance professionnelle; calcul de surindemnisation; art. 34a al. 1 LPP et 24 al. 1 OPP2
Une disposition règlementaire d’une caisse de pensions prévoyant la prise en compte d’une rente AI « hypothétique » calculée selon l’échelle de rente 44 (au lieu, en l’espèce, de l’échelle de rente 28 appliquée par l’AI en raison d’une durée incomplète de cotisations) contrevenait à l’évaluation d’une éventuelle surindemnisation conformément aux art. 34a al. 1 LPP et 24 al. 1 OPP2, qui visent à empêcher un « avantage injustifié », ainsi qu’au principe de l’égalité de traitement, qui doit être respecté dans le cadre de la marge de manœuvre laissée aux institutions de prévoyance selon l’art. 49 al. 2 LPP.
Auteur : Guy Longchamp
TF 9C_488/2020 du 17 février 2021
Assurance-maladie; soins de longue durée, financement résiduel, conflit négatif de compétence, application du nouveau droit à un état de fait préexistant; art. 25a al. 5 LAMal
Le financement des soins de longue durée est réparti entre l’assurance-maladie, le canton, cas échéant la commune en cas de délégation, et la personne assurée. Conformément à l’art. 25a al. 5 LAMal, dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2019, le canton compétent pour la prise en charge du financement résiduel est celui du dernier domicile de la personne avant son entrée en EMS. Le séjour en EMS lui-même ne fonde aucune nouvelle compétence. Le domicile au sens des art. 23 ss CC et le canton compétent pour le financement résiduel peuvent ainsi différer (c. 7.1.1). Cette dissociation n’existait pas sous l’ancien droit.
En l’espèce, la personne assurée séjournait en EMS depuis plusieurs années au moment de l’entrée en vigueur de la disposition légale précitée. En vertu de l’interdiction de l’application rétroactive des lois, et en l’absence de réglementation spécifique applicable aux situations qui ont débuté avant l’entrée en vigueur du nouveau droit et qui perdurent au moment de cette entrée en vigueur, il faut admettre que la personne assurée avait fondé son domicile au lieu de son séjour en EMS au moment où elle y était rentrée, et que le canton, respectivement la commune, dans laquelle se trouve cet établissement demeure compétent pour le financement résiduel des soins, même après l’entrée en vigueur du nouvel art. 25a al. 5 LAMal.
Auteure : Anne-Sylvie Dupont
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