NLRCAS Juillet 2021
Editée par Christoph Müller, Anne-Sylvie Dupont, Guy Longchamp et Alexandre Guyaz
TF 8C_538 et 564/2020 du 30 avril 2021
Assurance-accidents; notions de travailleur et d’employeur; art. 11 LPGA; 1a LAA
Le TF a dû se pencher sur le cas d’un joueur-entraîneur de hockey, victime d’une luxation traumatique de l’épaule gauche au cours d’un match, ayant entraîné une incapacité de travail de longue durée. Ce joueur était au bénéfice de plusieurs contrats de travail. Les juges fédéraux ont retenu qu’il devait être considéré comme un travailleur, au sens de l’art. 1a LAA, en qualité de joueur-entraîneur et que son accident devait être qualifié de professionnel. De plus, la Haute Cour a jugé que son employeur était la société chargée de gérer certaines tâches de l’association sportive, et non l’association elle-même.
Auteur : Guy Longchamp
TF 9C_426/2020 du 29 avril 2021
Assurance-invalidité; capacité de travail résiduelle, mise en œuvre, exigibilité, home office; art. 7 et 8 LPGA
Une personne assurée souffrant de dépression et de troubles paniques se voit reconnaître, médicalement, une capacité de travail résiduelle de 50 % dans une activité adaptée aux atteintes à la santé. Le litige porte sur l’exigibilité de la mise en œuvre de cette capacité résiduelle. Le TF rappelle que cette question doit être examinée à la lumière de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce (c. 5.2). Lorsque la possibilité d’exercer effectivement l’activité compatible avec l’état de santé est à ce point restreinte qu’elle n’existe pas ou pratiquement pas sur le marché équilibré du travail ou que l’on ne peut s’attendre à ce qu’un employeur embauche la personne assurée, la mise en œuvre de la capacité de travail résiduelle ne peut être considérée comme exigible (c. 5.3).
Même si, en l’espèce, les médecins ont estimé que la personne assurée conservait une capacité de travail à 50 % dans des activités commerciales, l’on ne saurait considérer l’arrêt 9C_15/2020 comme un précédent valable. Dans cette affaire, le TF avais admis que la capacité de travail résiduelle pouvait être mise en œuvre dans un emploi exercé en home office. Il n’en va pas de même dans cette affaire, la personne assurée n’osant pas sortir de chez elle, ce qui l’empêche d’une part de se présenter à un entretien d’embauche, et, d’autre part, de se rendre au moins ponctuellement dans les locaux de l’employeur. Dans ces conditions, la mise en œuvre de la capacité de travail ne peut être considérée comme exigible.
Auteure : Anne-Sylvie Dupont
TF 9C_525/2020 du 29 mai 2021
Assurance-invalidité; désignation d’un expert, qualification d’auxiliaire, information aux parties, valeur probante d’une expertise; art. 44 LPGA
Une rente partielle est accordée à un assuré atteint de sclérose en plaques sur la base d’une expertise neuropsychologique. Il recourt contre cette décision, son recours est rejeté par le Tribunal administratif de Zoug. Il recourt au Tribunal fédéral qui admet son recours et renvoie l’affaire à l’OAI pour complément d’instruction (l’expertise est jugée formellement non probante). L’assuré invoque une violation de l’art. 44 LPGA, en ce sens que son droit de poser des questions à l’expert n’a pas été respecté. Il conteste en outre la qualification d’auxiliaire du tiers ayant assisté l’expert désigné, ainsi que la valeur probante de l’expertise sur laquelle l’Office AI de Zoug s’est fondée pour lui accorder un quart de rente (capacité résiduelle de 60 %).
L’expert mandaté pour une expertise est non seulement la personne chargée et responsable de l’évaluation, mais également la personne physique qui l’effectue. Il doit en outre réaliser personnellement les tâches de base pour lesquelles il a été mandaté, puisqu’il l’a précisément été en raison de son expertise, de ses compétences scientifiques particulières et de son indépendance. La substitution ou le transfert, même partiel, de la mission à un autre expert, sont soumis au consentement du mandant. En revanche, l’expert peut faire appel à un auxiliaire, celui-là agissant sous sa direction et sa surveillance, pour la réalisation de certains travaux subordonnés. Dans ce cas, le consentement du mandant n’est pas nécessaire, tant que la responsabilité de l’expertise demeure entre les mains de l’expert désigné.
Par ailleurs, lorsqu’un expert est mandaté pour réaliser une expertise, son nom doit être communiqué à l’avance afin que la personne assurée puisse faire valoir ses éventuels motifs de récusation. Le droit de l’assuré de connaître ce nom ne s’étend toutefois qu’à l’expert désigné, et non aux tiers qualifiés qui assistent celui-là dans l’exécution de ses travaux.
En l’espèce, une seule experte a été mandatée pour réaliser l’expertise neuropsychologique sur laquelle l’office AI s’est fondé pour accorder un quart de rente à l’assuré. Or, il ressort du rapport que l’experte tierce a été sérieusement impliquée dans la réalisation dudit rapport. Il s’ensuit que l’experte tierce n’a pas agi en qualité d’auxiliaire subordonnée, pour laquelle le consentement du mandant n’était pas nécessaire, mais en tant que co-experte, puisqu’elle a été impliquée dans la même mesure que l’experte principale. Ainsi, l’assuré aurait également dû être informé du nom de l’experte tierce, laquelle devait également cosigner le rapport d’expertise, sous peine de remettre en cause la validité formelle et la valeur probante de l’expertise.
Enfin, un ou une experte mandatée pour réaliser une expertise doit disposer des qualifications professionnelles énumérées dans la circulaire IV n° 367 de l’OFAS, ce que le dossier de la cause ne permet pas de vérifier pour l’experte tierce.
Auteur : Gilles de Reynier, avocat à Colombier (Milvignes)
TF 9C_415/2020 du 17 mai 2021
Assurance-invalidité; procédure, reconsidération, domicile en Suisse, séjour de courte durée; art. 53 al. 2 LPGA
Un couple de Suédois a résidé pendant six mois en Suisse. Durant le séjour, le couple a eu un enfant. Dès sa naissance, l’enfant a eu besoin de soins médicaux qui ont été pris en charge par l’AI. Après le retour du couple en Suède, l’office AI compétent a transmis le cas à l’office AI pour les assurés résidant à l’étranger (ci-après : OAIE). Après analyse du cas, l’OAIE a décidé que l’AI n’aurait pas dû verser de prestations car les parents de l’enfant n’avaient jamais rempli les conditions pour être assurés auprès des assurances sociales suisses. Le traitement de l’enfant, qui n’était pas non plus assuré par l’AI, aurait dès lors dû être pris en charge par l’assurance-maladie de ce dernier. L’assurance-maladie forme recours au TF qui rejette le recours.
Selon le TF, la reconsidération au sens de l’art 53 al. 2 LPGA est possible lorsque – en plus de l’importance d’une rectification – la décision est manifestement erronée (c. 4.1). Le fait que l’autorité avait initialement la possibilité de prendre une décision conforme au droit sur la base des documents qui lui ont été fournis n’est pas pertinent (c. 4.3). Même lorsque l’erreur de la décision initiale n’est pas manifeste, la reconsidération selon l’art. 53 al. 2 LPGA n’est pas exclue. Selon le TF, la reconsidération est ainsi possible lorsque l’erreur n’est visible qu’après un examen plus approfondi (c. 4.4).
L’instance inférieure a rappelé que l’existence d’un domicile en Suisse pendant des courts séjours ne doit être admise qu’avec beaucoup de retenue. Une autorisation de séjour de courte durée UE/AELE n’est ainsi pas suffisante pour constituer un domicile en Suisse. Selon l’instance inférieure, dans le cas d’espèce, le fait que le séjour du couple était un séjour strictement lié à la formation et sans volonté de s’installer durablement en Suisse, que la mère utilisait toujours un numéro de téléphone et compte bancaire suédois auprès l’office AI et que le couple n’avait pas travaillé en Suisse, démontrait que le couple n’avait pas établi un domicile légal en Suisse (c. 4.6.2). Le TF s’est rattaché à l’avis de l’instance inférieure (c. 4.6.3).
Auteur : Charles Guerry, avocat à Fribourg
TF 8C_244/2020 du 15 avril 2021
Responsabilité de l’Etat; harcèlement, tort moral, dommage évolutif, prescription, dies a quo; art. 20 al. 1 aLRCF; 60 al. 1 et 328 CO
L’affaire porte sur une action en responsabilité de la Confédération déposée le 26 septembre 2018, visant à la réparation du tort moral pour des actes constitutifs de harcèlement au travail qui se sont déroulés de 2010 à 2014, date de la fin des rapports de travail, ainsi qu’un acte en été 2016, dont la recourante n’a eu connaissance que le 29 septembre 2017. L’ancien art. 20 al. 1 LRCF prévoyait un délai de prescription relatif d’une année à compter du jour de la connaissance du dommage. Le TF applique l’art. 60 al. 1 CO sur le dies a quo.
La connaissance du dommage inclut aussi celle de son étendue. Le lésé doit être en mesure d’apprécier, au moins dans les grandes lignes, l’ampleur du dommage ; le processus qui le provoque doit être arrivé à son terme. Tant que dure l’évènement dommageable, le lésé ne peut pas connaître l’intégralité du dommage et le délai de prescription ne commence pas à courir. Lorsqu’il s’agit d’une « situation qui évolue », le délai de prescription ne cours pas avant le terme de l’évolution. Tel est le cas lorsqu’un préjudice est causé par des comportements dommageables répétés s’inscrivant dans la durée (c. 4.3).
Le TF retient que le harcèlement psychologique se définit comme un enchaînement de propos et/ou d’agissements hostiles, répétés fréquemment pendant une période assez longue, par lesquels un ou plusieurs individus cherchent à isoler, à marginaliser, voir à exclure une personne sur son lieu de travail. Ainsi, les actes de mobbing allégués ont pris fin au plus tard à la fin des rapports de travail, de sorte qu’une éventuelle atteinte à la personnalité postérieure à cette date ne saurait constituer une unité temporelle avec les atteintes survenues pendant les rapports de travail (c. 6.1).
Concernant les faits survenus entre 2010 et 2014, la recourante avait une connaissance suffisante de son dommage en 2015, époque où elle avait réalisé que sa souffrance était une conséquence de son vécu dans le cadre de son emploi. Il importe peu qu’elle n’ait appris le diagnostic de stress post-traumatique qu’en janvier 2016 et que ce diagnostic n’ait disparu qu’en juillet 2017. En effet, même si les troubles psychiques ont évolué, comme le dommage invoqué n’est pas un préjudice matériel mais un tort moral, il suffit que la recourante ait reconnu que le harcèlement subit était à l’origine de sa souffrance psychique. Elle ne pouvait ainsi pas attendre la stabilisation ou la disparition de ses troubles pour ouvrir action. Il s’en suit que l’action est prescrite concernant des faits survenus entre 2010 et 2014 (c. 6.3).
S’agissant de l’acte de 2016, le TF retient qu’en l’absence de rapports de travail, si elle entendait obtenir réparation d’une violation de ses droits de la personnalité par le responsable incriminé, il appartenait à la recourante d’ouvrir une action en réparation du tort moral selon le droit civil, directement contre ce dernier (c. 7.2).
Auteur : Thierry Sticher, avocat à Genève
TF 4A_635/2020 du 5 mai 2021
Responsabilité du fait des produits; application dans le temps, responsabilité de l’employeur, défaut; art. 55 al. 1 CO; 4 et 13 LRFP
B. travaillait comme nettoyeuse dans une banque lorsqu’elle s’est blessée au bras gauche en utilisant un ascenseur. En effet, elle a essayé d’empêcher la fermeture de la porte de l’ascenseur avec son bras qui se serait alors coincé dans ladite porte qui se refermait. Le cas a été considéré comme un accident par l’assureur LAA qui a finalement octroyé une rente d’invalidité réduite et une indemnité pour atteinte à l’intégrité. En outre, l’assurance responsabilité civile du propriétaire du bâtiment (art. 58 CO) lui a accordé une indemnisation de CHF 657’123.95. Par ailleurs, dans le cadre d’une procédure contre le fabricant de l’ascenseur pour l’obtention d’un tort moral de CHF 30’000.-, B. a eu gain de cause devant les instances cantonales.
Interpellé par le fabricant de l’ascenseur, le TF rappelle tout d’abord que la loi fédérale sur la responsabilité du fait des produits (LRFP) ne s’applique pas au cas d’espèce, car l’installation a été mise en fonction avant l’entrée en vigueur de ladite loi (01.01.1994) et qu’il convient donc de déterminer une éventuelle responsabilité sous l’angle de l’art. 55 CO (responsabilité de l’employeur) (c. 2.1 et 2.2).
Dans le contexte de l’application de l’art. 55 CO pour la responsabilité d’un producteur, le lésé supporte le fardeau de la preuve du défaut (c. 3.1) et, ce n’est qu’une fois cette preuve apportée qu’une éventuelle preuve libératoire du producteur doit être recherchée (c. 3.2). La question de savoir si la jurisprudence du TF développée pour l’art. 4 LRFP (cf. ATF 133 III 81) selon laquelle le lésé n’a pas à prouver la cause du défaut, mais doit uniquement démontrer que le produit ne remplissait pas les expectatives de sécurité légitimes du consommateur moyen serait à appliquer en lien avec l’art. 55 CO, peut rester ouverte. En effet, la défectuosité d’un produit présuppose que celui-ci crée un état de fait dangereux et qu’une conception plus sûre ait été raisonnablement possible au moment de sa mise en circulation. Cela découle du principe du risque qui est à la base de la responsabilité du producteur développée sur la base de l’art. 55 CO (c. 4.2).
En l’occurrence, le fait que l’ascenseur aurait joué un rôle dans la survenance du dommage ne suffit pas à démontrer un défaut. De même, le fait qu’il soit généralement facile de déterminer rétrospectivement quelles mesures dans la conception d’un produit auraient pu prévenir ledit dommage, ne permet pas en soi d’établir une quelconque responsabilité. En conclusion, le dommage ne prouve pas en soi un défaut (c. 4.4) et le TF a admis le recours du fabricant de l’ascenseur (c. 5).
Auteur : Walter Huber, juriste à Puplinge
TF 4A_495/2020 du 3 mai 2021
Responsabilité du détenteur d’ouvrage; dommage évolutif, atteinte à la santé, invalidité, prescription, dies a quo; art. 42 al.2, 58 et 60 al. 1 CO; art. 227 al. 3 CPC
Le TF rappelle que le lésé connaît suffisamment le dommage lorsqu’il apprend, touchant son existence, sa nature et ses éléments, les circonstances propres à fonder et à motiver une demande en justice. Le lésé n’est pas admis à différer sa demande jusqu’au moment où il connait le montant absolument exact de son préjudice, car le dommage peut devoir être estimé selon l’art. 42 al. 2 CO. Ainsi, le dommage est suffisamment défini lorsque le lésé détient assez d’éléments pour qu’il soit en mesure de l’apprécier. Le lésé est par ailleurs en mesure de motiver sa demande lorsqu’il connaît le montant réel (maximal) de son dommage. Il lui est en effet toujours loisible de réduire en tout temps ses conclusions en cours d’instance (art. 227 al. 3 CPC).
Le délai de l’art. 60 al. 1 CO part du moment où le lésé a effectivement connaissance du dommage au sens indiqué ci-dessus, et non de celui où il aurait pu découvrir l’importance de sa créance en faisant preuve de l’attention commandée par les circonstances. Le lésé est en outre tenu d’avoir un comportement conforme à la bonne foi (art. 2 CC) ; s’il connaît les éléments essentiels du dommage, on peut attendre de lui qu’il se procure les informations nécessaires à l’ouverture d’une action.
Lorsque l’ampleur du préjudice dépend d’une situation qui évolue, le délai de prescription ne court pas avant le terme de cette évolution. Tel est le cas notamment du préjudice consécutif à une atteinte à la santé dont il n’est pas possible de prévoir d’emblée l’évolution avec suffisamment de certitude. En particulier, la connaissance du dommage résultant d’une invalidité permanente suppose que, selon un expert, l’état de santé du lésé soit stabilisé sur le plan médical et que son taux d’incapacité de travail soit fixé au moins approximativement ; le lésé doit en outre savoir, sur la base des rapports médicaux, quelle peut être l’évolution de son état.
En l’espèce, la situation du lésé, victime d’un accident sur un chantier, était certes encore évolutive, mais seulement s’agissant des thérapies envisageables et non de sa capacité de travail qui était nulle et non sujette à évolution. Le TF retient que c’est ce moment-ci, soit lorsque l’état de santé du lésé s’était stabilisé et que celui-ci savait qu’il était en incapacité de travail totale, qui constitue le dies a quo. Ayant sollicité l’intimée qu’elle renonce à se prévaloir de l’exception de prescription plus de douze mois après avoir eu suffisamment connaissance de son dommage, le lésé est débouté de ses conclusions.
Auteur : Rémy Baddour, titulaire du brevet d’avocat à Genève
TF 4A_14/2021 du 15 février 2021
Assurances privées; assurance collective, indemnité journalière en cas de maladie, CGA, incapacité de travail après la fin des rapports de travail, annonce tardive, conséquence; art. 45 LCA
Le TF se penche essentiellement sur l’interprétation de différentes clauses portant sur les conséquences d’une annonce tardive d’une incapacité de travail, contenues dans les conditions générales d’assurance (CGA) de l’intimée, une assurance collective indemnité journalière en cas de maladie. Il rappelle qu’il s’agit d’une assurance complémentaire soumise à la LCA, que les litiges qui en découlent relèvent du droit privé (c. 1) et que le contenu et les buts des CGA s’interprètent selon les mêmes principes que les autres dispositions contractuelles (c. 5).
Dans le cas d’espèce, le recourant a avisé l’intimée de son incapacité de travail en date du 22 mai 2019. Le 7 octobre 2019, par convention conclue dans le cadre d’une procédure de conciliation, lui et son employeur ont rétroactivement résilié les rapports de travail au 31 mars 2018.
Le TF tranche tout d’abord la question de savoir si l’intimée peut se prévaloir de la date conventionnelle de la fin du contrat de travail du recourant. Examinant la volonté réelle des parties, le TF conclut qu’il n’y a aucune raison pour que la date du 31 mars 2018 ne soit pas également déterminante dans la relation entre les parties. Aux termes des CGA de cette dernière, la couverture d’assurance se termine à la fin du contrat de travail. Ainsi, lors de la survenance de l’événement assuré le 22 mai 2019, le recourant n’était plus assuré (c. 4).
Selon les CGA de l’intimée, toute incapacité de travail totale ou partielle doit lui être annoncée dans les 15 jours dès sa survenance. Après l’expiration de ce délai, le jour où elle a eu connaissance de l’incapacité est considéré comme le premier jour de l’incapacité. En cas de retard excusable de la déclaration, le paiement des indemnités journalières est limité à 180 jours précédant la date de l’avis.
Il s’agit de déterminer si la date de l’annonce tardive de l’incapacité correspond à la survenance de l’incapacité ou si les clauses précitées ne font que limiter l’étendue de l’obligation de verser des prestations, la faisant débuter qu’à la date de l’annonce tardive. Le TF confirme l’interprétation retenue par les instances cantonales. Le recourant considère qu’une telle interprétation peut mener à un résultat choquant, à savoir que même si l’incapacité survient durant une période de couverture, elle ne serait pas couverte si elle est annoncée avec du retard après la fin des rapports de travail. Le TF rejette cet argument, indiquant qu’une telle constellation n’est pas la règle et ne peut se produire que si l’assuré ne déclare pas son incapacité de travail à temps, sans que ce retard soit excusable (c. 6.2). Le TF estime enfin que ces clauses ne sont pas contraires à l’art. 45 LCA (c. 7.2) et ne sont ni insolites, ni inhabituelles (c. 8.3).
Auteur : David Métille, avocat à Lausanne
TF 4A_463/2020 du 28 avril 2021
Assurances privées; assurance de chose, application du droit étranger; art. 116 al. 1 LDIP; L113-2 2 et L113-8 du Code des assurances français
Le recourant a rempli et signé une proposition d’assurance par laquelle il attestait du parfait état de santé du cheval qu’il souhaitait assurer en taisant un rapport du vétérinaire, lequel avait relevé des « éléments de risques majeurs quant à l’achat dudit cheval comme cheval de sauts d’obstacles » et indiqué que « si le cheval devait être acheté, il serait raisonnable de voir avec le vendeur s’il était possible de mettre une garantie sur l’absence de boiterie du membre antérieur droit compte tenu de la présence d’une molette tendineuse d’un pronostic réservé à défavorable ». Lors d’une expertise mise en œuvre après que le cheval s’est mis à boiter, l’assureur a pris connaissance du rapport de visite d’achat précité. L’assureur a annulé le contrat pour fausse déclaration intentionnelle ou d’une omission de déclaration d’une circonstance de nature à aggraver le risque garanti ou à en créer de nouveaux. L’assuré agit contre l’assureur afin d’obtenir le paiement des indemnités d’assurance en contestant la nullité du contrat d’assurance. Les juges précédents ont rejeté ses prétentions.
Le TF constate dans un premier temps que les parties ont choisi de soumettre le contrat au droit français (art. 116 LDIP) de sorte que ce sont les art. L113-2 2° du Code des assurances français (obligation de répondre correctement aux questions posées) et L113-8 du Code des assurances français (nullité du contrat d’assurance en cas de réticence) qui trouvent application dans cette affaire, ce qui n’était pas contesté.
Devant le TF, le recourant soulève trois griefs. D’abord, il se plaint du refus du premier juge d’entendre l’expert vétérinaire de la compagnie d’assurance par voie de commission rogatoire. Ce grief est vain selon notre Haute Cour, dès lors que l’audition réclamée ne porte pas sur un fait crucial pour l’issue du litige. Dans un deuxième moyen, le recourant dénonce une violation des art. 222 al. 2, 2e phrase et 317 CPC, soutenant le caractère non authentique d’un courrier. Ce moyen doit être écarté selon le TF dès lors que cela ne change rien à l’issue du litige. Enfin, le recourant faisait grief à la Cour de justice d’avoir procédé à une mauvaise application du droit. Toutefois, le recours ne peut être formé pour application erronée du droit étranger, compte tenu du fait qu’il s’agit ici manifestement d’une affaire pécuniaire (art. 96 let. b LTF a contrario). Le TF n’examine pas si le droit étranger – désigné par le droit international privé suisse – a été ou non mal appliqué ; s’y ajoute que le recourant n’invoque pas l’interdiction de l’arbitraire garantie par l’art. 9 Cst., ce qui de toute manière eût été vain selon le TF, puisque l’arrêt attaqué apparaissant tout sauf indéfendable au regard du droit français. Le recours a ainsi été rejeté.
Auteure : Amandine Torrent, avocate à Lausanne
Brève...
Le simple fait que le tribunal cantonal renvoie l’affaire à l’office AI pour mettre en œuvre une expertise ne suffit pas pour justifier l’octroi de l’assistance gratuite d’un conseil juridique. En l’espèce, le fait que la recourante était représentée dans la première étape de la procédure, que la procédure AI soit pendante depuis près de huit ans ainsi que la modification de la jurisprudence relative aux syndromes de dépendance, ajoutés à la situation subjective de la personne assurée, singulièrement l’absence de formation professionnelle achevée et la présence d’une maladie psychique, justifiait l’octroi de l’assistance juridique gratuite pour la phase administrative (TF 8C_149/2021).
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